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Vous pouvez y parler de tout
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Chron
Synchrone or not synchrone ?
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Message par Chron »

L'insupportable (et mythomane notoire) Amélie Nothomb refait ses frasques littéraires avec pour thème le Japon dans son dernier livre, sensé être un côté positif à "Stupeur et Tremblements".
Ci dessous, ce qui doit être les premières pages du livre (à vérifier), où, si ce texte est bien l'incipit de ce roman, cela nous annonce bien du (dé)plaisir à lire cette verve. Déjà le fait aberrant qu'elle veuille faire passer ses inepties pour une autobiographie. La dame se sera bien documentée sur le sujet et fait preuve d'un bon sens de l'observation, au service d'un ethnocentrisme rare, ce qui me fait me dire que je n'ai qu'un mot en tête quand je pense à ce roman, à cette personne : Horripilant.
Surtout quand je pense qu'il servira de reflet au Japon dans les milieux "intellos" pendant un bon moment... Désespérant.
C'est une réaction sûrement encore trop à fleur de peau, il faudra que je me fasse violence pour lire ce truc à un moment ou un autre pour avoir la possibilité de le démonter comme il faut, le cas échéant.
Ni d'Eve, ni d'Adam (Amélie Nothomb)

Le moyen le plus efficace d'apprendre le japonais me parut d'enseigner le français. Au supermarché, je laissai une petite annonce: «Cours particuliers de français, prix intéressant».

Le téléphone sonna le soir même. Rendez-vous fut pris pour le lendemain, dans un café d'Omote-Sando. Je ne compris rien à son nom, lui non plus au mien. En raccrochant, je me rendis compte que je ne savais pas à quoi je le reconnaîtrais, lui non plus. Et comme je n'avais pas eu la présence d'esprit de lui demander son numéro, cela n'allait pas s'arranger. «Il me rappellera peut-être pour ce motif», pensai-je.

Il ne me rappela pas. La voix m'avait semblé jeune. Cela ne m'aiderait pas beaucoup. La jeunesse ne manquait pas à Tokyo, en 1989. A plus forte raison dans ce café d'Omote-Sando, le 26 janvier, vers quinze heures.

Je n'étais pas la seule étrangère, loin s'en fallait. Pourtant, il marcha vers moi sans hésiter.

- Vous êtes le professeur de français?

- Comment le savez-vous?

Il haussa les épaules. Très raide, il s'assit et se tut. Je compris que j'étais le professeur et que c'était à moi de m'occuper de lui. Je posai des questions et appris qu'il avait vingt ans, qu'il s'appelait Rinri et qu'il étudiait le français à l'université. Il apprit que j'avais vingt et un ans, que je m'appelais Amélie et que j'étudiais le japonais. Il ne comprit pas ma nationalité. J'avais l'habitude.

- A partir de maintenant, nous n'avons plus le droit de parler anglais, dis-je.

Je conversai en français afin de connaître son niveau: il se révéla consternant. Le plus grave était sa prononciation: si je n'avais pas su que Rinri me parlait français, j'aurais cru avoir affaire à un très mauvais débutant en chinois. Son vocabulaire languissait, sa syntaxe reproduisait mal celle de l'anglais qui semblait pourtant son absurde référence. Or il était en troisième année d'étude du français, à l'université. J'eus la confirmation de la défaite absolue de l'enseignement des langues au Japon. A un tel degré, cela ne pouvait même plus s'appeler de l'insularité.

Le jeune homme devait se rendre compte de la situation car il ne tarda pas à s'excuser, puis à se taire. Je ne pus accepter cet échec et tentai de le faire parler à nouveau. En vain. Il gardait sa bouche close comme pour cacher de vilaines dents. Nous étions dans une impasse.

Alors, je me mis à lui parler japonais. Je ne l'avais plus pratiqué depuis l'âge de cinq ans et les six jours que je venais de passer au pays du Soleil-Levant, après seize années d'absence, n'avaient pas suffi, loin s'en fallait, à réactiver mes souvenirs enfantins de cette langue. Je lui sortis donc un galimatias puéril qui n'avait ni queue ni tête. Il était question d'agent de police, de chien et de cerisiers en fleur.

Le garçon m'écouta avec ahurissement et finit par éclater de rire. Il me demanda si c'était un enfant de cinq ans qui m'avait enseigné le japonais.

- Oui, répondis-je. Cette enfant, c'est moi.

Et je lui racontai mon parcours. Je le lui narrai lentement, en français; grâce à une émotion particulière, je sentis qu'il me comprenait.

Je l'avais décomplexé.

En un français pire que mauvais, il me dit qu'il connaissait la région où j'étais née et où j'avais vécu mes cinq premières années: le Kansaï.

Lui était originaire de Tokyo, où son père dirigeait une importante école de joaillerie. Il s'arrêta, épuisé, et but son café d'un trait.

Ses explications semblaient lui avoir coûté autant que s'il avait dû franchir un fleuve en crue par un gué dont les pierres auraient été écartées de cinq mètres les unes des autres. Je m'amusai à le regarder souffler après cet exploit.

Il faut reconnaître que le français est vicieux. Je n'aurais pas voulu être à la place de mon élève. Apprendre à parler ma langue devait être aussi difficile que d'apprendre à écrire la sienne.

Je lui demandai ce qu'il aimait dans la vie. Il réfléchit très longtemps. J'aurais voulu savoir si sa réflexion était de nature existentielle ou linguistique. Après de telles recherches, sa réponse me plongea dans la perplexité:

- Jouer.

Impossible de déterminer si l'obstacle avait été lexical ou philosophique. J'insistai:

- Jouer à quoi?

Il haussa les épaules.

- Jouer.

Son attitude relevait soit d'un détachement admirable, soit d'une paresse face à l'apprentissage de ma langue colossale.

Dans les deux cas, je trouvai que le garçon s'en était bien sorti et j'abondai dans son sens. Je déclarai qu'il avait raison, que la vie était un jeu: ceux qui croyaient que jouer se limitait à la futilité n'avaient rien compris, etc.

Il m'écoutait comme si je lui racontais des bizarreries. L'avantage des discussions avec les étrangers est que l'on peut toujours attribuer l'expression plus ou moins consternée de l'autre à la différence culturelle.

Rinri me demanda à son tour ce que j'aimais dans la vie. En détachant bien les syllabes, je répondis que j'aimais le bruit de la pluie, me promener dans la montagne, lire, écrire, écouter de la musique. Il me coupa pour dire:

- Jouer.

Pourquoi répétait-il son propos? Peut-être pour me consulter sur ce point. Je poursuivis:

- Oui, j'aime jouer, surtout aux cartes.

C'était lui qui semblait perdu, à présent. Sur la page vierge d'un carnet, je dessinai des cartes: as, deux, pique, carreau.

Il m'interrompit: oui, bien sûr, les cartes, il connaissait. Je me sentis extraordinairement stupide avec ma pédagogie à deux sous. Pour retomber sur mes pattes, je parlai de n'importe quoi: quels aliments mangeait-il? Péremptoire, il répondit:

- Ourrrrhhhh.

Je croyais connaître la cuisine japonaise, mais cela, je n'avais jamais entendu. Je lui demandai de m'expliquer. Sobrement, il répéta:

- Ourrrrhhhh.

Oui, certes, mais qu'était-ce?

Stupéfait, il me prit le carnet des mains et traça le contour d'un oe; uf. Je mis plusieurs secondes à recoller les morceaux dans ma tête et m'exclamai:

- Œ uf!

Il ouvrit les yeux comme pour dire: Voilà!

- On prononce oe; uf, enchaînai-je, oe; uf.

- Ourrrrhhhh.

- Non, regardez ma bouche. Il faut l'ouvrir davantage: oe; uf.

Il ouvrit grand la bouche:

- Orrrrhhhh.

Je m'interrogeai: était-ce un progrès? Oui, car cela constituait un changement. Il évoluait, sinon dans le bon sens, du moins vers autre chose.

- C'est mieux, dis-je, pleine d'optimisme.

Il sourit sans conviction, content de ma politesse. J'étais le professeur qu'il lui fallait. Il me demanda le prix de la leçon.

- Vous donnez ce que vous voulez.

Cette réponse dissimulait mon ignorance absolue des tarifs en vigueur, même par approximation. Sans le savoir, j'avais dû parler comme une vraie Japonaise, car Rinri sortit de sa poche une jolie enveloppe en papier de riz dans laquelle, à l'avance, il avait glissé de l'argent.

Gênée, je refusai:

- Pas cette fois-ci. Ce n'était pas un cours digne de ce nom. A peine une présentation.

Le jeune homme posa l'enveloppe devant moi, alla payer nos cafés, revint pour me fixer rendez-vous le lundi suivant, n'eut pas un regard pour l'argent que je tentais de lui rendre, salua et partit.

Toute honte bue, j'ouvris l'enveloppe et comptai six mille yens. Ce qui est fabuleux quand on est payé dans une monnaie faible, c'est que les montants sont toujours extraordinaires. Je repensai à «ourrrrhhhh» devenu «orrrrhhhh» et trouvai que je n'avais pas mérité six mille yens.

Je comparai mentalement la richesse du Japon avec celle de la Belgique et conclus que cette transaction était une goutte d'eau dans l'océan d'une telle disproportion. Avec mes six mille yens, au supermarché, je pouvais acheter six pommes jaunes. Adam devait bien cela à Eve. La conscience apaisée, j'allai arpenter Omote-Sando.
--

Sinon, rien à voir, mais j'adore ces splendides fansubbers :
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:kgrin:
@+
Chron
???, ??? ?? ?? ?? ???,???, ? ??? ?? ???

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Fargo
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Message par Fargo »

Rhoo putain on se croirait revenu au temps du mythe du gentil sauvage (façon Anna et le roi avec Yul Briner) qu'il faut sauver de son ignorance crasse et de sa barbarie... Bon en même temps c'est qu'un passage, je laisse le bénéfice du doute à la dame. Si ça se trouve le japonais l'emmène dans un "empire des sens" à la fin ^^ (autre cliché qui colle à la peau du pays du soleil levant).

Je compte sur toi pour nous en faire un résumé moi j'aurai pas le courage de lire ça.
Jem> C'était pas un bukkake de toi, de mémoire c'était plutôt du Sterna je crois...

ganesh2
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Message par ganesh2 »

j'avais bien aimé moi , stupeur et tremblements...

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jem
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Message par jem »

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"Now, look! No one is to stone anyone until I blow this whistle! Do you understand?! Even, and I want to make this absolutely clear, even if they do say they liked 'Stupeur et Tremblements'."
I found my freedom now.
Funny how it feels just like being alone...

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pasteqman
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Message par pasteqman »

Moi aussi, mais on peut pas vraiment parler de chef-d'oeuvre littéraire. Ce n'est qu'un toast.
TO THE WINDOW !

TO THE WALL !

TO THE SWEAT DROP FROM MY BALLS !

ganesh2
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Message par ganesh2 »

bah je l'avais lu parceque c'était dans la bibliothèque de mon grand père hein ...

Et comme je dis il se trouve que j'ai bien aimé.

adorya
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Message par adorya »

Ceci dit, en parlant de l'apprentissage du français au japon, ce n'est pas une majorité mais il y a des cas qui sont quand même assez grave chez les japonais. C'est dommage que le Blog de Mariemeia n'a plus l'historique de l'année dernière mais elle enseignait le français à Nova et elle a rencontré des étudiants assez délirants (bon je sais Nova c'est pas la référence non plus.)

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maje
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Message par maje »

Les vieux otaques qu'on croise dans les fac de japonais en France sont pas mal non plus.


Regardez Chron.


Ahahahaha
"Et le Directeur de cabinet était également parti faire pipi ?"
Alexandre Jardin

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Chron
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Message par Chron »

Et encore, je m'en tire plutôt pas mal...
@+
Chron
???, ??? ?? ?? ?? ???,???, ? ??? ?? ???

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c.lambin
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Message par c.lambin »

Difficile de donner un avis basé sur ce seul extrait.
« Quand on est bien dedans, ça fait quand même plaisir » (Chron)
« Donc en fait Book-off, c'est comme Mandarake mais pour les gens normaux ? » (Anonyme)

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Chichi
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Message par Chichi »


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JeP
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Message par JeP »

Et bin je trouve ça taré. Au début, bon, tu te dis oué, oké, elle est chiante cette présentation. Puis petit à petit... et là t'as le coup des gusses sur la plage et c'est tout bonnement énorme. Pfiou.
TAMATAMATAMATAMA

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parotaku
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Message par parotaku »

Ouais, c'est bluffant...

Avec cet algorithme, on va pouvoir encore plus facilement truquer les photos... faudrait montrer ça à la TV, histoire de convaincre ceux qui ont encore une confiance aveugle dans les images...
KONAMI TOKYO (KCET)
____FOREVER!!____
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... et quelques vidéos de jeux...

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mitch
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Message par mitch »

ah oué...
mais qu'est-ce qu'ils attendent pour nous mettre ça dans toshop?
If... she... weighs... the same as a duck,... she's made of wood.

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TRANTKAT
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Message par TRANTKAT »

... 'tain le ièp pour retoucher des photos porno !!! *3*

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